Et si l’auto-dépistage était une solution efficace pour lutter contre l’alcoolémie au volant ?
Première cause de mortalité sur les routes françaises, l’alcool est impliqué en moyenne dans 30% des accidents mortels depuis l’année 2000. L’alcool au volant demeure un fléau qui semble impossible à faire reculer.
Après avoir fait un point de situation sur l’évolution de la législation sur l’alcool au volant, les accidents de la circulation, la répression et la prévention, expliquer pourquoi l’auto dépistage s’avère l’unique levier pour combattre l’alcool au volant semble nécessaire.
Chronologie de la législation sur l’alcool au volant :
Recherché depuis 57 ans dans les accidents de la circulation, l’alcool fait l’objet d’une législation évolutive. 12 ans après l’aggravation des sanctions encourues pour conduite sous l’emprise d’un état alcoolique, le taux légal d’alcool baisse pour les titulaires d’un permis de conduire probatoire.
- 15/12/1958 : création des infractions de conduite sous l’empire d’un état alcoolique et de conduite en état d’ivresse.
- 09/07/1970 : Seuil maximum autorisé 0,80 gramme par litre de sang (g/l). Dépistage obligatoire en cas d’accident ou d’infraction grave.
- 08/12/1983 : Seuil maximum autorisé 0,80 g/L. Apparition des moyens de dépistage par air expiré.
- 10/07/1987 : Aggravation des peines principales d’amende et d’emprisonnement pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique.
- 10/07/1989 : La constatation d’infraction pour non port du casque ou de la ceinture de sécurité autorise le contrôle de l’alcoolémie. En cas de récidive de conduite sous l’empire d’un état alcoolique, le délai est porté à 10 ans pour repasser son permis de conduire.
- 11/07/1994 : Création d’une contravention pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique entre 0,70g/L et 0,80 g/l.
- 15/12/1995 : Abaissement du seuil légal contraventionnel à 0,50 g/l. Perte de 3 points pour la contravention et de 6 points pour le délit.
- 26/02/1996 : Les sanctions encourues pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique sont étendues à l’accompagnateur d’un élève conducteur.
- 12/06/2003 : Aggravation des peines encourues et perte de 6 points pour toute infraction pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique.
- 25/10/2004 : Le seuil maximum toléré pour la conduite d’un véhicule de transport en commun passe à 0,20 gramme par litre de sang.
Depuis le 1er juillet 2015, le taux maximum légal d’alcoolémie pour les titulaires d’un permis probatoire baisse à 0.10 milligramme par litre d’air expiré (mg/l) soit 0.20 g/l de sang.
Les justifications
Les accidents de la route sont la 1ère cause de mortalité et de handicap des 18-25 ans et dans 1/4 de ces accidents, une alcoolémie excessive en est la cause. Un conducteur novice a 4 fois plus de risque d’être impliqué dans un accident mortel. Les conducteurs novices sont impliqués dans 24% des accidents mortels. Dès la première année d’adoption de la réduction du taux d’alcoolémie en Allemagne pour les titulaires d’un permis de conduire probatoire, la mortalité routière a diminué de 17 % chez les 18-21 ans.
Les conséquences
A partir de 0,10 milligramme par litre d’air expiré, le titulaire d’un permis probatoire s’expose à une contravention de quatrième classe (135€ d’amende et retrait de 6 points sur le permis de conduire). La première année de permis probatoire, le titre de conduite sera invalidé à la première infraction de conduite sous l’emprise d’un état alcoolique.
Pourquoi pas zéro ?
L’ingestion de certains médicaments (thérapie contre le VIH), remèdes de grand-mère (Jouvence de l’abbé Soury) ou aliments (chocolats à la liqueur, pain noir, autres mets fermentés) peuvent faire légèrement augmenté le taux d’alcoolémie.
La limite légale dans les autres pays pour les permis probatoires
La tolérance est de Zéro pour la République Tchèque, la Slovaquie, la Hongrie, la Roumanie et l’Allemagne.
Qui est titulaire d’un permis de conduire probatoire ?
Est considéré comme titulaire d’un permis de conduire probatoire :
– la personne passant pour la première fois un permis de conduire,
– la personne, qui ayant fait l’objet d’une invalidation ou annulation de son permis de conduire, le repasse.
Quelle est la durée d’un permis de conduire probatoire ?
Pour une personne ayant suivi la formation de l’apprentissage anticipé de la conduite, le délai probatoire sera de deux ans, Pour la formation traditionnelle, ce délai est de trois ans.
Les accidents de la circulation avec mise en cause de l’alcool
Le scénario type d’accident mortel avec un taux d’alcoolémie positif est un accident survenant avec un seul véhicule, circulant sur une route départemental e ou communale, hors agglomération et hors intersection. Les conducteurs de véhicules légers alcoolisés impliqués dans un accident mortel de la circulation routière oublient souvent de boucler leur ceinture (30.4% des conducteurs impliqués).
Le nombre d’accidents mortels avec implication de l’alcool passe de 1341 en 2000 à 701 en 2013, ce qui représente une baisse de 47,73 %. Le nombre total d’accidents a également diminué de 50% durant cette période. L’alcool est mis en cause dans environ 24 % du total des accidents mortels de la circulation routière et de 30 % des accidents mortels au taux d’alcoolémie connu. En 2013, pour 13,3 % des conducteurs impliqués dans un accident mortel de la circulation routière, le taux d’alcoolémie n’a pas été mentionné dans le fichier des Bulletins d’Analyse des Accidents Corporels.
En 2000, 1616 personnes ont perdu la vie dans un accident avec implication d’une alcoolémie positive (30,8 % des tués) et en 2013, 762 personnes sont décédées (29,1 % des tués). (Source la Sécurité Routière en France 2000, 2010, 2012 et 2013)
Dans 12 % des accidents, les conducteurs présentent un taux d’alcoolémie contraventionnel. L’auto dépistage aurait évité à ces conducteurs de prendre le volant avec une alcoolémie positive. En 2013, 11 % des conducteurs impliqués dans un accident mortel de la circulation routière présentent un taux contraventionnel (entre 0,25 et 0,39 milligramme par litre d’air expiré). 55 % des conducteurs impliqués présentaient une alcoolémie supérieure à 0,75 mg/l.
Lorsque l’accident survient il est trop tard pour revenir en arrière et dire “si j’avais su !”
Quand les conducteurs prendront conscience que le véritable danger réside dans le risque de provoquer un accident plus que de perdre son permis de conduire, nous aurons fait un grand pas pour la sécurité routière.
La répression
Certains conducteurs mettent en cause le travail des Forces d’Ordre en précisant n’avoir été contrôlé qu’une fois en quarante ans de conduite, alors que d’autres protestent contre les contrôles alcoolémie pour avoir été dépistés plusieurs fois dans la semaine. Donc personne n’est satisfait, qu’en est-il réellement ?
Le nombre de dépistages de l’imprégnation alcoolique préventifs (sans infraction, ni accident) diminue depuis ces dernières années en raison de la charge de travail des forces de l’ordre.
Toutefois, depuis 2006 en moyenne 3% des conducteurs dépistés préventivement sont positifs (3.8% en 2013).
Il faut savoir que les lieux et horaires des contrôles d’alcoolémie ne sont pas le fruit du hasard mais d’une étude fréquente et pertinente par le responsable des unités spécialisées en sécurité routière prenant en compte non seulement les accidents mortels mais également les festivités locales.
3.7% des conducteurs contrôlés après commission d’une infraction sont dépistés positifs. Les dépistages positifs après accident s’élèvent à 9.4% des accidents matériels, 5.5% des accidents corporels et 17.73% des mortels. En 2014, 92736 alcoolémies contraventionnelles sont verbalisées et 167 067 alcoolémies délictuelles sont constatées.
Depuis 2012, le nombre de contraventions pour conduite d’un véhicule sous l’emprise d’un état alcoolique diminue.
En conclusion, contrairement au contrôle de vitesse automatisé, le contrôle d’alcoolémie nécessite la présence d’un policier ou d’un gendarme sur le terrain. Compte tenu des charges de travail actuelles (Vigipirate) des forces de l’ordre, il paraît impossible d’augmenter le nombre de contrôles. L’orientation spatio-temporelle des contrôles alcoolémies est une réalité, les forces de l’ordre s’adaptent en permanence pour orienter leurs services.
La Prévention
Les actions menées annuellement par la sécurité routière avec les Intervenants Départementaux de Sécurité Routière (IDSR), les auto écoles, les collectivités territoriales, les entreprises de prévention du risque routier et les associations sont nombreuses et pertinentes notamment en milieu scolaire et en entreprise. Toutefois, aucune information sur leur nombre exact n’est disponible. Seuls les médias locaux relayent les informations sur les actions de prévention.
Les moyens de sensibilisation sont nombreux : Dosesbar pour faire prendre conscience de la dose d’alcool servie entre amis, le parcours de simulation d’alcoolémie avec les lunettes de perturbation de la vue (https://www.saser.fr/parcourssimulationalcool.html), le simulateur d’alcoolémie pour expliquer l’assimilation, le taux maximum d’alcool pouvant être atteint et le délai d’élimination (https://www.saser.fr/simulationalcool.html) et le réactiomètre pour prouver l’impact négatif de l’alcool sur le temps de réaction (https://www.saser.fr/reactiometre.html).
L’auto dépistage
Pendant de nombreuses années, la sécurité routière, les associations et les assureurs distribuaient des éthylotests lors des actions de prévention. Cette pratique permettait aux intervenants d’établir un dialogue et de sensibiliser les usagers sur les dangers réels de l’alcool.
En 2012, la sécurité routière a voulu inculquer aux automobilistes l’auto dépistage. Le décret publié au Journal officiel du 1er mars 2012 rend la détention d’un éthylotest homologué obligatoire dans chaque véhicule carrossé un éthylotest homologué. L’article L234-14 du Code de la route rappelle cette obligation. Faute de décret d’application, il est impossible pour les forces de l’ordre de verbaliser en cas d’absence d’éthylotest. Totalement décrié par des associations et des médias, l’éthylotest destiné à sauver des vies reste confidentiel.
Pourtant l’éthylotest à usage unique a été utilisé durant une trentaine d’années par les forces de l’ordre sans aucun problème majeur de fiabilité malgré des conditions d’emploi délicates. Tous les dépistages positifs étaient confirmés par des mesures de vérification par éthylomètre ou par analyse sanguine.
L’auto dépistage était connu et accepté par la grande majorité des usagers de la route qui, lors de la mise en place en 2012 de l’éthylotest obligatoire dans chaque véhicule , se déclaraient pour 82 % d’entre eux favorables à la mesure et prêts à s’auto dépister régulièrement. En bref, un fiasco et une perte de confiance des conducteurs malgré un dispositif fortement fiabilisé par les exigences normatives entre 2012 et 2015. Actuellement peu d’automobilistes recherchent des éthylotests même gratuits.
Pourtant l’auto dépistage s’avère être un levier fondamental pour lutter contre l’alcool au volant en faisant prendre conscience du taux atteint non seulement aux conducteurs potentiels mais également à leur entourage.
85% des conducteurs alcoolisés impliqués dans les accidents de la circulation routière sont des buveurs occasionnels.
En 2015, le baromètre AXA PREVENTION rappelle que 21% des jeunes prennent le volant après avoir consommé 2 verres d’alcool (-4% par rapport à 2014) et que 2% reconnaissent prendre le volant après avoir bu 4 à 5 verres.
Comment savoir si je peux légalement reprendre le volant après un cocktail, un repas entre amis, un dîner au restaurant ou un rendez vous client ? Il faut connaître la dose d’alcool ingérée, l’heure de fin d’absorption de boisson alcoolisée, sa morphologie. Pas si simple. Monsieur ayant consommé beaucoup d’alcool ne prendra pas le volant, mais Madame ayant consommé deux ou trois verres d’alcool le peut elle ?
La seule solution reste le dépistage avec un éthylotest homologué à usage unique ou électronique.
Quand s’auto-dépister ?
L’auto dépistage est préconisé 30 mn minimum après la dernière consommation d’une boisson alcoolisée à jeun et une heure après un repas. Il est conseillé de faire un second contrôle 15 mn après le premier afin de vérifier que le taux d’alcoolémie n’est pas en phase montante.
Avec quoi s’auto-tester ?
Uniquement avec un éthylotest homologué NF ou certifié selon les exigences réglementaires et législatives suivantes :
- Décret n° 2015-775 du 29 juin 2015 fixant les exigences de fiabilité et de sécurité relatives aux éthylotests chimiques destinés à un usage préalable à la conduite routière
- Décret n° 2015-774 du 29 juin 2015 modifiant les articles R.234-2 et R.234- 7 du code de la route et le décret 2008-883 du 1er septembre 2008 relatif aux éthylotests électroniques.
Les éthylotests utilisables avec des smart phones ne sont pas homologués.
La liste des éthylotests certifiés conformes est publiée sur la liste officielle du Laboratoire National d’Essais – https://www.lne.fr/recherche-certificats/search/systems/S1/92/S2/105/S3/111/lang/fr
Vous pouvez employer un éthylotest à usage unique
- CONTRALCO
- CHUBE
- REDLINE
ou un éthylotest électronique
- ETHYWAY
- ETHYLEC
- PELIMEX
- DRAGER 3000
Mode d’emploi de l’étylotest à usage unique CONTRALCO
Le mode d’emploi est imprimé sur la poche.
- vérifier la date de validité de l’éthylotest,
- sortir le tube test en haut du ballon et appuyer fortement sur les 2 extrémités du tube pour percer les capsules d’étanchéité.
- souffler pour gonfler en une seule fois le ballon entièrement
- insérer le tube test (côté bleu) dans l’embout bleu du ballon
- dégonfler doucement le ballon dans sa totalité
Comment lire le résultat :
- les cristaux du tube restent jaunes, le test est négatif, vous pouvez conduire !
- le changement de coloration des cristaux (deviennent verts atteint la limite du trait noir ne prenez pas le volant.
Le prix d’un éthylotest à usage unique est d’environ 1.50 euros et l’éthyway vaut environ 100 euros (pour 500 dépistages et un recalibrage au premier terme échu de 500 dépistages ou tous les 12 mois pour 28€)
Mode d’emploi de l’éthylotest ETHYWAY, jeune conducteur
Appuyer sur le bouton, attendre que l’éthylotest termine son auto test et soufflez sans interruption jusqu’au bip sonore puis lire le résultat.
Le résultat est en dessous du taux maximum le conducteur peut prendre le volant.
Le résultat est positif pour le titulaire d’un permis probatoire.
Le résultat est négatif pour le titulaire d’un permis de conduire définitif.
Le résultat est positif pour le titulaire d’un permis de conduire définitif. Ne pas conduire.
Que se passe t’il si je suis positif à l’éthylomètre des forces de l’ordre?
Le dépistage fait d’initiative permet d’établir une présomption et n’est pas opposable au résultat de l’éthylomètre des forces de l’ordre. Il serait surprenant qu’en employant un éthylotest électronique homologué et respectant les conditions optimales de dépistage que vous obteniez un faux négatif.
Jacques Guillemoto
Association SASER
Cher collègues, je me permets de ” réagir ” en copié-collé de ces infos
Mes sources : http://www.senat.fr/rap/l02-093/l02-0933.html
Le dépistage est certes un moyen mais que saura l’usager sur le taux, la durée d’élimination et son aptitude à reprendre le volant ? Aura t’il un second éthylo ou jouera t’il au chat et à la souris en se disant ” je peux conduire ” ?
Bon courage dans vos actions